Enquête naturaliste sur les canaux
10 juin 2022
4 minutes de lecture
Mais comment la bague d’un petit oiseau référencé il y a 5 ans en Angleterre a-t-elle pu se retrouver entre les mains expertes des agents en charge de la biodiversité sur les canaux de Bretagne ? Découvrez l’histoire insolite d’un Pipit farlouse ayant parcouru 500 km avant de croiser le chemin d’une Chouette effraie bretonne.
Fin 2021, en analysant les pelotes de réjection (agglutination de poils, d’os, et d’autres restes d’animaux non digérés que dégurgitent certains oiseaux carnivores) d’une Chouette effraie retrouvées à proximité du canal d’Ille-et-Rance, un agent naturaliste de la Région Bretagne a fait une découverte surprenante. Outre les restes osseux de petits animaux habituellement présents dans ces pelotes, le technicien a eu la surprise de trouver une bague dite « métal », c’est-à-dire posée par un scientifique pour réaliser des suivis scientifiques d’oiseaux.
La bague portait ces indications :
NH MUSEUM
LONDON SW7
Z675281
Le mystère élucidé
L’oiseau avait été bagué par le muséum d’Histoire naturelle de Londres ! Informé de cette trouvaille, le muséum d’Histoire naturelle de Paris a contacté à son tour son homologue londonien qui a confirmé l’information : la bague avait été posée sur un Pipit farlouse, petit passereau au plumage brun, de sexe non identifié, le 8 octobre 2015 à 11h20 dans la réserve naturelle de Ramsley dans le comté de Derby.
L’oiseau retrouvé mort 4 ans plus tard (la pelote ayant été récoltée le 18 novembre 2019) avait donc parcouru plus de 550 km à « vol d’oiseau » avant de constituer le repas d’une Chouette effraie, aux abords des canaux de Bretagne. Une distance remarquable quand on sait que ces petits oiseaux ne pèsent pas plus de 16 à 25 g.
En images
Mieux connaître pour mieux protéger
On ne le sait pas forcément mais la Région et ses agent∙e∙s, pami leurs missions de gestion des canaux de Bretagne, oeuvrent pour préserver la biodiversité. Et pour bien protéger, il faut bien connaître ! C’est dans ce cadre qu’ils et elles effectuent de nombreux prélèvements et observations de terrain.
Les méthodes sont multiples et adaptées en fonction des espèces : recherche de crottes et fèces pour par exemple identifier la présence de la loutre, du ragondin ou encore du campagnol amphibie, recherche de gîtes à chauves-souris dans les caves et greniers des maisons éclusières ou encore comptage des oiseaux d’eau à la longue vue.
Véritable police scientifique, les équipes peuvent également effectuer des inventaires par recherche d’ADN.
Les pelotes de rejection, une mine d’informations
Une des techniques les plus efficaces consiste à analyser les pelotes de réjection des Chouettes effraie.
Pour le naturaliste, cette matière est un luxe car elle dispense de faire des inventaires des micromammifères qui sont très fastidieux : la chouette fait tout le travail d’échantillonnage ! Il suffit ensuite de décortiquer ces pelotes et rechercher les proies ingérées pour reconstituer le régime alimentaire du rapace nocturne et mieux encore, analyser le paysage en fonction des espèces ingérées et du pourcentage de chaque proie.
- régime alimentaire varié = paysage diversifié et bocage préservé
- régime alimentaire peu varié et présence importante de campagnol des champs = paysage dégradé et agricole
Les agent∙e∙s des canaux suivent ainsi une dizaine de sites occupés par la chouette qui trouve refuge dans des maisons éclusières inoccupées.
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